Environnement, Data, questions éthiques… Les nouveaux enjeux du management sont nombreux. Les jeunes, eux, arrivent sur le marché du travail avec des attentes « extrêmement hétérogènes », auxquelles les entreprises vont devoir s’adapter. Décryptage avec Olivier de La Villarmois, Directeur du MBA MAE (Management et Administration des Entreprises) de l’IAE Paris-Sorbonne.
« Maîtriser les fondamentaux pour faire face à un environnement complexe et être capable d’interagir efficacement avec ses équipes ». C’est, entre autre, ce que l’on attend d’un bon manager, assure Olivier de La Villarmois, professeur à l’IAE Paris-Sorbonne, Directeur délégué aux programmes et Directeur du MBA MAE (Management et Administration des Entreprises).
« Ce qui est intéressant, c’est d’avoir, au départ, des compétences fortes sur un domaine, comme un ingénieur, un médecin ou un avocat par exemple, explique-t-il. Le futur manager va s’appuyer sur ces compétences fortes en développant des compétences managériales annexes qui vont lui permettre de gérer des équipes dans de grandes entreprises ». Pour ce faire, il doit être initié à plusieurs domaines, dont les problématiques financières, juridiques, marketing, ou encore de ressources humaines.
Le rôle du manager face à de nouveaux enjeux
Les nouveaux enjeux du management, eux, sont multiples. Parmi eux, « ceux concernant toutes les problématiques ESG (Environnement, Social, et Gouvernance), qui doivent être maîtrisées. Il faut être conscient de l’impact des décisions sur l’environnement, notamment parce que cela fait partie des attentes de la nouvelle génération. Ce sont des éléments qui doivent absolument être intégrés dans les décisions au quotidien », explique le professeur.
Autre enjeu important : la sensibilisation au monde de la Data, délaissé par « quelques générations de managers ». « Tous les managers étaient historiquement formés aux problématiques de la Data via les cours de statistiques. Puis, à partir du milieu des années 90, nous avons commencé à demander à nos étudiants ce qu’ils pensaient des cours. Celui de statistiques étaient l’un des moins appréciés. Aujourd’hui, nous sommes en train de réintroduire ces questions-là dans les programmes. C’est un autre gros sujet qui doit être maîtrisé ». L’IA, elle, pourrait notamment permettre de personnaliser des profils plus facilement lors des recrutements, « de faire des propositions plus alignées avec les attentes, sans que cela mobilise des ressources trop importantes pour le service RH ». Le manager devra aussi « absolument maîtriser ces outils pour gagner en productivité et passer plus de temps avec ses équipes ».
Sans oublier « la question éthique », elle aussi primordiale. « Le manager doit être capable de faire face à des dilemmes éthiques, ce qui nécessite une formation. En France, ce sont des choses que l’on fait assez peu, que l’on retrouve beaucoup plus chez les anglo-saxons. Cela est très important pour rester crédible vis-à-vis de ses équipes, être capable de faire face à des situations complexes ».
Profil de manager et attentes de la nouvelle génération
Les générations qui arrivent sur le marché du travail ont quant à elles de nouvelles attentes, « extrêmement hétérogènes », observe Olivier de La Villarmois. Pour attirer « des personnalités », les entreprises vont devoir s’adapter, estime-il. « Il faudrait réussir à intégrer dans les mêmes équipes des personnes qui sont pilotées différemment. Et peut-être, si l’on pousse ce modèle très loin, travailler avec des salariés et des personnes qui sont en freelance dans les mêmes équipes ».
Les nouveaux managers doivent, de fait, être à l’écoute des salariés afin de leur proposer des solutions qui leur conviennent. « On va également avoir différents niveaux de valeurs. Les valeurs de l’organisation, qui doivent être compatibles avec tout le monde, puis des valeurs personnelles. Il faut réussir à les associer pour pouvoir travailler ensemble. Il y a un gros travail à faire en amont sur la cohérence du système de valeurs du salarié avec celles de l’entreprise, en acceptant des différences si elles ne sont pas rédhibitoires », détaille Olivier de La Villarmois.
Compétences : quelles formations pour les futurs managers ?
« On ne peut pas être manager si l’on ne maîtrise pas tout, rappelle le Directeur délégué aux programmes de l’IAE Paris-Sorbonne. Au niveau de la formation, nous sommes intransigeants sur le fait de maîtriser les hard skills, les fondamentaux ». De fait, aucune compensation n’est pratiquée. « Les étudiants doivent valider tous les modules pour obtenir leur diplôme ».
« Ensuite, il y a tout ce qui est soft skills (compétences comportementales). Elles sont travaillées de manière indirecte au travers de la pédagogie », précise Olivier de La Villarmois.
Durant leur formation, les étudiants procèdent notamment à des études de cas en groupe. « C’est une expérience managériale où l’on se retrouve avec des personnes très différentes. Les étudiants vont devoir apprendre à travailler ensemble pour réussir à délivrer quelque chose. En revanche, lorsqu’on les laisse constituer eux-mêmes leur groupe, les meilleurs sont tous ensemble, et les moins bons aussi. Ceux qui ne travaillent pas sont donc obligés de s’y mettre. À chaque fois, c’est une véritable expérience », explique le professeur.
« Nous avons aussi l’opportunité de faire travailler des étudiants plus expérimentés avec des juniors. Nos étudiants en MBA, âgés de 35 ans en moyenne, se retrouvent lors d’un cours avec de jeunes ingénieurs, qui sont le plus souvent en première année d’activité professionnelle. Et là, ça fait des étincelles », raconte Olivier de La Villarmois. L’occasion de confronter les points de vue de deux générations qui seront emmenées à collaborer.
Pour les plus âgés, « les mettre en situation d’apprendre à travailler avec des plus jeunes, qui ont des attentes différentes, est un véritable enjeu ». La nouvelle génération, quant à elle, a ainsi un avant-goût de ce qui l’attend en entreprise, « avec des managers qui ont leur propre vision du monde du travail ».
Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : Comment former au management de demain ?
Nouveaux enjeux du management : Les managers doivent intégrer des enjeux cruciaux tels que l’ESG (Environnement, Social, et Gouvernance) et la maîtrise de la Data. Ces compétences sont essentielles pour répondre aux attentes croissantes des jeunes qui arrivent sur le marché du travail.
Compétences requises : Un futur manager doit posséder des compétences techniques solides dans un domaine spécifique tout en développant des compétences managériales variées (financières, juridiques, marketing, ressources humaines) pour gérer des équipes efficacement au sein d’entreprises.
Adaptation aux attentes des nouvelles générations : Les jeunes travailleurs ont des attentes hétérogènes et les entreprises doivent s’adapter en intégrant des collaborateurs avec des capacités et des approches différentes, y compris des freelances, tout en respectant les valeurs personnelles et organisationnelles.
Formation des futurs managers : Les programmes de formation doivent allier la maîtrise des hard skills et le développement des soft skills. Des méthodes pédagogiques telles que les études de cas et la collaboration intergénérationnelle sont essentielles pour préparer des managers capables de travailler avec diverses personnalités.
Importance de l’éthique : Former les futurs managers à faire face à des dilemmes éthiques est crucial pour assurer leur crédibilité et leur capacité à naviguer dans des situations complexes. Ce type de formation est encore peu courant en France et doit être renforcé.