L’impact psychologique de Parcoursup chez les jeunes et leurs parents

Parcoursup est stressant pour les jeunes et leur famille.

Pourquoi Parcoursup, plateforme conçue pour recueillir les vœux d’orientation des futurs étudiants, représente une source de stress pour nombre de lycéens et leurs parents ? Explications avec la psychologue Sylvie Amici.


La sentence Parcoursup. Elle angoisse les lycéens qui, en fin d’année, présentent leur vœux pour la suite de leurs études. Quelle voie s’offrira à eux ? Quelle école les acceptera ? Quel diplôme pourront-ils préparer ? Une étape cruciale qui se révèle, la majorité du temps, anxiogène pour la grande majorité des jeunes, mais aussi leurs parents, souvent impuissants et angoissés face à l’attente et aux refus subis par leur progéniture.

Selon une étude de 2023 du Ministère de l’Éducation Nationale, 68 % des lycéens ressentent un stress significatif lors de la période des candidatures sur Parcoursup. Sylvie Amici est présidente de l’Association des Psychologues et de Psychologie dans l’Éducation nationale (APsyEN). Elle intervient régulièrement dans les collèges et lycées, aux premières loges pour mesurer l’ampleur de l’effet Parcoursup chez les jeunes.

Pour nous éclairer, elle nous explique le système, créé par le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation en 2018, qui peut sembler nébuleux. « Parcoursup est une interface d’information sur l’enseignement supérieur. Tout le monde s’accorde à dire que ce versant informatif est très bien fait et est même plutôt rassurant pour les familles qui se penchent dessus. La seconde partie concerne les dossiers à constituer qui varient selon les établissements visés. La troisième phase est la plus stressante, avec l’attente des réponses, positives ou négatives. Elles arrivent au fil de l’eau ce qui fait que le classement est constamment remis en question.

Cela demande des prises de décision, chaque jour. Ces réponses au compte goutte mettent également à mal les meilleurs élèves qui doivent se positionner très vite, en tranchant parmi une multitude de possibilités, avec toujours le doute : « est-ce que j’ai fait le bon choix ? ». Pour les élèves les plus fragiles, cette période d’incertitude peut durer longtemps, jusqu’à la rentrée de septembre avec les commissions et la procédure complémentaire. Pour tous, d’autres sources d’inquiétude vont s’ajouter comme celle de chercher un logement au dernier moment, par exemple. »

Pour Sylvie Amici il ne faut pas non plus mésestimer l’impact des réseaux sociaux qui vont accentuer cette impression de flux tendu et amplifier le stress. « Les jeunes discutent, comparent, échangent. Certains sont félicités tandis que d’autres sont encore dans l’attente. Il ne s’agit plus alors d’un phénomène individuel, mais collectif. Leur stress ne leur appartient plus totalement. Mais je ne veux pas diaboliser cette interaction, car elle peut engendrer du négatif comme du positif. Des jeunes voient que d’autres jeunes n’ont pas de réponse, qu’ils sont comme eux. Les réseaux sociaux ont aussi un effet ressource. »

« On sait combien faire un choix est complexe ; il y a des biais qui se mélangent, de l’affect, de l’anticipation, du raisonnement… », précise Sylvie Amici. Face à cette pression, certains lycéens vont mettre en place des stratégies d’évitement : « Il y a ceux qui essayent de se protéger en se convaincant qu’ils verront bien ; un peu comme s’ils s’en remettaient au hasard. Ils se désengagent de toute responsabilité. Il y en a d’autres qui procrastinent et reculent le moment de remplir les dossiers. Seulement, les délais d’inscription sont très courts – seulement quelques jours – et s’ils ne répondent pas dans les temps, ces jeunes sont considérés comme démissionnaires de la procédure. Résultat, de plus en plus se tournent vers des établissements privés leur promettant des inscriptions sans passer par Parcoursup. »

Le stress de l’étudiant devient un phénomène collectif, largement partagé et amplifié sur les réseaux sociaux. Et ceux qui se retrouvent aussi « embarqués », sont ceux qui constituent le cercle proche de l’enfant, à commencer par les parents ! Une enquête de l’Association des Parents d’Élèves (APE) indique que 72 % d’entre eux ressentent une anxiété considérable. Pour eux aussi, une foultitude d’émotions se jouent comme l’analyse la psychologue : « Les parents qui stressent le plus sont ceux qui vont mettre le plus d’enjeux dans les études, qui parfois revivent ce qu’ils ont eux-mêmes vécu dans leur scolarité, leurs regrets, donc ce n’est pas raisonné et raisonnable, il y a énormément d’affect. » Comment accompagner au mieux leur adolescent alors qu’il est à un âge où la moindre intrusion parentale peut provoquer de la procrastination et de la résistance ? « Il n’y a pas de solution idéale, mais il faut en parler tous ensemble et se préparer en amont. Je recommande aux jeunes d’avoir un ordre de préférence et de faire une pré-sélection dans leur tête pour qu’ils ne se retrouvent pas à accepter n’importe quoi, dans l’urgence. »