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Études d’orthophonie : une sélection exigeante malgré la pénurie de professionnels

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Études d'orthophonie : une sélection exigeante pour peu de places malgré la pénurie de professionnels

Dans l’ombre de la médecine et des filières paramédicales, les études d’orthophonie ne sont que trop peu mises sur le devant de la scène. Alors que nous manquons cruellement d’orthophonistes en France, les étudiant.e.s sont aujourd’hui trop peu nombreux pour, un jour, espérer pallier cette pénurie.


En 2024, ce ne sont pas moins de 30 532 candidats qui ont tenté leur chance afin d’entrer dans un des centres de formation universitaire en orthophonie (CFUO). Néanmoins, seulement 975 places étaient à pourvoir, soit un taux d’accès moyen de 3,21 %. Des quotas relativement bas qui brident l’augmentation du nombre de professionnels. Ces derniers, aux côtés des étudiants, essayent tant bien que mal de faire entendre leurs revendications.

Cette année, les taux d’admission étaient relativement faibles et variaient entre 1,42 % et 9,43 % selon les centres de formation. Mais comme nous le rappelle Caroline Fargeix, orthophoniste libérale et professeure vacataire au CFUO de Clermont-Ferrand, la sélection d’entrée a toujours été rude. « Quand j’ai passé le concours à Lyon, dans les années 80, on était 2 500 et ils n’en ont pris que 45 à la fin », illustre-t-elle.

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Depuis 2020, l’entrée en études d’orthophonie ne se fait plus grâce à un examen écrit mais via Parcoursup dans un premier temps. Les étudiants retenus passent ensuite un oral, dernière étape de la sélection. Concours ou Parcousup, même combat, les places sont chères. « Dans certains CFUO, vous pouvez avoir 2 000 néo-bacheliers qui font la demande, 500 qui sont pris à l’examen oral pour seulement une centaine de places au final » témoigne Camille, présidente de la FNEO (ndlr : Fédération Nationale des Étudiants en Orthophonie). 

Mais, à la différence d’un examen écrit, sur Parcousup, les notes ne font pas tout. « Il faut avoir un bon dossier au lycée, certes, mais les CFUO regardent beaucoup les appréciations des professeurs, nos centres d’intérêts et nos motivations » explique Charlotte, en quatrième année d’orthophonie.

La sélection à l’entrée offre peu de places en études d’orthophonie donc. Et paradoxalement, les orthophonistes constituent aujourd’hui la profession de santé dont on manque le plus en France. Ils sont 21 200 à exercer en libéral, soit une moyenne de 30 professionnels pour 100 000 habitants. En orthophonie, « la pénurie est partout, que ce soit en ville ou en campagne. Ce ne sont pas seulement les déserts médicaux le problème mais juste le manque de professionnels en général » affirme Caroline.

Une pénurie dont les personnes en quête de soin sont les premières victimes. « En tant qu’orthophoniste, je suis obligée de refuser des patients, de dire que je n’ai plus de places » poursuit-elle. Un problème qui a aussi des répercussions sur les étudiant.e.s, « moins il y a d’orthophonistes autour de chez nous, plus c’est compliqué de trouver des stages en cabinet » confie Camille.

Face à cette situation, professionnels comme étudiants réagissent. La solution ? Augmenter le nombre de places dans les études d’orthophonie, comme le souligne la présidente de la FNEO. « On aimerait une hausse des quotas dans tous les centres de formation. Mais c’est compliqué car il faut un budget, des nouveaux professeurs et de meilleures infrastructures. Il faut que l’augmentation des quotas se fasse dans des bonnes conditions et non au détriment des étudiants actuels ».

Les prières des orthophonistes sont sur le point d’être exaucées, puisqu’une proposition de loi transpartisane a vu le jour en avril. Cette dernière prévoit de mettre en place une programmation de quotas d’entrée en études d’orthophonie pour les années 2025-2030. Le nombre d’étudiants admis dans les CFUO sera ainsi porté à 1 073 à la rentrée 2025 (contre 975 en 2024) et progressera pour atteindre 1 463 en 2030.

« On est en faveur de cette proposition de loi, cependant, on met en garde sur le fait que cela doit être fait dans de bonnes conditions. Si les budgets n’augmentent pas, ça ne sert à rien d’augmenter le nombre d’étudiants » rappelle Camille, présidente actuelle de la FNEO. Une opinion partagée par Caroline Fargeix, professeure au CFUO de Clermont-Ferrand. « L’année prochaine on sera 30 étudiants au lieu de 25 actuellement et c’est déjà une grande avancée. Mais la situation va être compliquée. On augmente le nombre d’étudiants mais cela veut dire qu’il nous faut des salles de cours plus grandes et plus de professeurs. Tout est une question de financement ».

Cette proposition de loi, bien qu’elle arrive à point nommé, ne suffit pas totalement à faire oublier le manque de considération envers les étudiants en orthophonie et leurs aînés. « En tant qu’orthophonistes, on est peu pris en compte par le gouvernement, on est une population un peu mal aimée » déclare Caroline Fargeix.

« En parallèle, on est quasiment que des femmes et on est beaucoup moins nombreux que les kinés ou les médecins. C’est compliqué de se faire entendre et de faire passer nos revendications » abonde l’orthophoniste.

Les deux étudiantes, Camille et Charlotte, respectivement en quatrième et troisième année corroborent ce sentiment. « On n’est pas plus de 4 500 étudiants en France, si on râle, on fait moins de bruit que les élèves en médecine » assurent-elles.


(vérifié par notre rédaction)

Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : Études d’orthophonie : une sélection exigeante pour peu de places malgré la pénurie de professionnels

Une sélection très compétitive : Les études dans les écoles d’orthophonie sont très sélectives, avec un taux d’admission moyen de seulement 3,21 % en 2024, en raison d’un nombre limité de places (975 pour plus de 30 000 candidats). La sélection, désormais via Parcoursup et un oral, favorise aussi les dossiers et motivations, rendant l’accès difficile.

Une pénurie majeure de professionnels : Malgré la forte demande et la pénurie d’orthophonistes (21 200 en France, soit 30 pour 100 000 habitants), le nombre de professionnels formés chaque année est insuffisant, ce qui limite l’accès aux soins et complique la prise en charge des patients.

Blocage des quotas d’entrée : Les quotas d’admission dans les centres de formation sont faibles, freinant la croissance du nombre d’orthophonistes. Une proposition de loi prévoit une augmentation progressive des places jusqu’en 2030, mais la réussite dépend du financement et des ressources disponibles.

Difficultés liées au financement et aux infrastructures : L’augmentation du nombre d’étudiants nécessite plus de budgets, de salles de cours et de personnel enseignant les compétences requises. La mise en œuvre de cette hausse est incertaine à cause des ressources limitées, malgré une volonté politique favorable.

Manque de reconnaissance et de considération : Les orthophonistes et étudiants dénoncent leur invisibilité et leur faible reconnaissance auprès du gouvernement, étant principalement des femmes, et peu nombreux face aux autres métiers de la santé, ce qui complique la défense de leurs revendications.

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