Alors que Philippe Baptiste, ministre de l’enseignement supérieur a annoncé un projet de loi pour garantir la qualité absolue des formations supérieur privé, Philippe Choquet, président de la Fesic, revient sur la réforme engagée et ses conséquences.
Interview de Philippe Choquet, président de la Fesic
Philippe Baptiste a annoncé une réforme pour garantir la qualité des formations supérieures privées. Quelles sont les évolutions prévues ?
Philippe Choquet : La segmentation de l’enseignement supérieur en deux cercles que le ministre a présentée vient formaliser ce qui était déjà une réalité. Le premier cercle inclut les formations qui s’inscrivent dans une mission de service public d’enseignement supérieur et de la recherche.
Dans ce premier cercle coexistent deux groupes : les établissements publics comme les universités ainsi que les établissements privés reconnus d’intérêt général via le label EESPIG.
Le deuxième cercle comprend des formations privées de grande qualité mais qui ne remplissent pas toutes les missions de l’enseignement supérieur. Il peut s’agir d’établissements plutôt orientés vers la formation, sans recherche académique, qui n’ont pas de contraintes d’ouverture sociale ou qui ont un but lucratif.
Dans quel but les EESPIG appartiennent à ce premier cercle aux côtés des universités ?
Philippe Choquet : Les établissements EESPIG ont une structure très similaire aux universités britanniques qui fonctionnent sous forme de fondation avec une dotation de l’État et qui demandent également des frais de scolarité mesurés.
En effet, nos établissements répondent à différentes règles définies par l’État. Nous participons aux missions de service public de l’enseignement supérieur, avec un adossement à la recherche, nous sommes à but non lucratif, nous avons des obligations sociales notamment en matière d’ouverture sociale…
Pour les établissements de deuxième cercle, comment seront-ils reconnus par l’État ?
Philippe Choquet : Les écoles privées lucratives ou non – comme les consulaires – pourront demander un agrément de l’État. Pour l’obtenir, elles devront passer une évaluation basée sur des critères d’exigence et de qualité des formations.
Pour autant, les établissements ne devront pas répondre aux missions de service public de l’enseignement supérieur. Ainsi, l’évaluation ne prendra pas en compte l’adossement à la recherche, l’ouverture sociale ou le caractère lucratif de l’établissement.
Et pour les autres établissements qui n’appartiendraient à aucun des deux cercles, que se passent-ils ?
Philippe Choquet : Ils n’auront pas la caution de l’État et ne figureront pas sur Parcoursup. Ce système va clarifier le paysage pour les jeunes et leurs parents. Cela va aussi renforcer la plateforme d’orientation qui ne recensera que les formations agréées et reconnues par l’État.
On sait que Parcoursup est quelques fois décrié, mais avec cette réforme, la plateforme va devenir une garantie de qualité des formations.
Quels seront les critères pris en compte pour obtenir un agrément ?
Philippe Choquet : En dehors de la qualité des formations, qui est centrale, rien n’est encore décidé concernant les critères.
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Selon moi, il est important de s’assurer d’un taux d’encadrement pédagogique fort avec des professeurs permanents, sachant que le modèle du privé lucratif repose souvent sur le recrutement de professeurs vacataires.
Il faut aussi que l’agrément soit délivré par une structure indépendante comme le Hcéres qui apporte une caution de qualité, d’autonomie financière et de neutralité.
Quelles sont les types d’interrogations qui subsistent aujourd’hui sur cette réforme ?
Philippe Choquet : Pour l’instant, nous n’avons pas encore de vision sur les moyens de contrôle des établissements, même si le prérequis de l’indépendance de l’organisme est acté.
Par ailleurs, la question des écoles consulaires est aussi posée. Ces établissements [comme HEC, ou ESCP ndlr], ne sont pas à but lucratif mais ils ne sont pas non plus EESPIG.
Pour l’instant, ces écoles seront plutôt dans le deuxième cercle et devront demander un agrément, sauf si certains demandent à être labellisés EESPIG. Elles devront se positionner entre intégrer le label EESPIG ou choisir l’agrément.
Sachant que ces écoles consulaires sont en partie ouvertes au capital, sous quelles conditions pourraient-elles devenir EESPIG ?
Philippe Choquet : En tout état de cause, il faudra être stricte sur plusieurs critères. Si 100 % des actionnaires d’une école consulaire sont à but non lucratif – CCI, fondation, alumni – alors la labellisation devrait être simple.
En revanche, s’il y a un acteur privé à but lucratif parmi les actionnaires, il faudra poser des conditions.
Avec ce système de premier et deuxième cercles, les accréditations délivrées par la CTI, la CEFDG sont-elles toujours pertinentes ?
Philippe Choquet : Toutes ces accréditations vont continuer d’exister puisqu’elles concernent des formations. Il me semble que cette évolution clarifie le périmètre global des établissements privés qui relèvent de l’enseignement supérieur reconnu par l’État.
Avant sa mise en place en 2027, nous avons un enjeu de communication auprès des familles des candidats pour leur expliquer les changements et leur permettre de choisir plus sereinement.
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Quel livre recommanderiez-vous à des étudiants ?
La vie secrète des arbres qui montre l’incroyable interdépendance de la vie sur terre et la beauté/fragilité de nos écosystèmes.
Quelles sont les personnes qui vous inspire dans votre écosystème et réseau ?
Les recteurs d’universités LaSalle ou directeurs d’école qui œuvrent dans des pays en guerre ou zones de conflit et qui mettent l’éducation au service de l’homme et d’une société plus juste (Palestine, Sud Soudan, Éthiopie, Congo RDC etc.)
Les lieux où vous aimez vous rendre ?
Les grands espaces « nature », à la montagne ou à la mer. Mais aussi, lorsque je suis en déplacement, aller sur les marchés, les souks pour aller à la rencontre des populations et appréhender leur culture
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Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : la réforme du contrôle et de la reconnaissance des formations privées dans l’enseignement supérieur en France.
Segmentation du paysage éducatif supérieur : La réforme du gouvernement introduit deux cercles d’établissements : le premier regroupant les universités et établissements EESPIG (reconnus d’intérêt général), et le second comprenant des types de formations privées de qualité mais sans mission de service public, souvent lucratives ou orientées formation.
Reconnaissance et critères d’agrément : Les établissements du premier cercle (universités, EESPIG) participent déjà aux missions publiques. Les autres peuvent demander un agrément basé sur des critères d’exigence, sans obligation d’assurer la recherche ou l’ouverture sociale, leur permettant d’être reconnus par l’État.
Clarification du rôle de Parcoursup : Seules les formations agréées ou reconnues par l’État seront référencées sur la plateforme Parcoursup, renforçant sa crédibilité comme plateforme d’orientation et garantissant une meilleure qualité des formations proposées aux candidats.
Maintien des accréditations existantes : Les accréditations actuelles, comme celles délivrées par la CTI ou la CEFDG, restent valides et pertinentes. Leur objectif est d’assurer un cadre pour les candidats. Une reconnaissance des offres de formation post bac et de leur qualité académique.
Perspectives et enjeux pour les établissements : Les écoles à but non lucratif, notamment les écoles consulaires, devront choisir entre le label EESPIG ou un agrément officiel. La condition d’indépendance et la composition du capital seront cruciales pour leur labellisation, avec une attention particulière sur la neutralité et la transparence.