Une campagne de financement participatif qui a récolté 126 000 euros, des étudiants qui passent de 56 % à 73 % de réussite grâce à un logement adapté : l’École du Louvre prouve qu’il est possible de transformer l’égalité des chances en égalité dans la réussite.
Eya travaillait tous les week-ends, même les jours fériés, pour survivre à Paris. Étudiante en master 1 à l’École du Louvre, boursière du Crous échelon 2, elle jonglait entre un emploi de novembre à mars et un mémoire exigeant. « C’était compliqué de gérer le temps de travail, le mémoire et les cours », témoigne-t-elle. « Sans repos. »
Son histoire illustre parfaitement la réalité que Claire Barbillon, directrice de l’École du Louvre, a découverte progressivement : « Quand j’ai pris mes fonctions il y a huit ans, il y avait encore une image un peu clichée qui collait à la peau de l’école, comme école privilégiée. Je me suis rendu compte qu’il y avait 30 % de boursiers sur critères sociaux, ce qui n’est pas rien quand on croise cette proportion avec celle des 70 % de nos élèves dont les familles ne résident pas en Île-de-France. »
Une précarité qui ne dit pas son nom
La précarité étudiante à l’École du Louvre revêt mille visages. Des situations d’urgence de plus en plus fréquentes depuis le Covid : étudiants qui « logent dans des conditions à la limite de l’insalubrité, qui économisent sur leur chauffage, sur la nourriture », rapporte Claire Barbillon.
Pour Eya, le quartier du Louvre amplifiait ces difficultés : « Le quartier est aussi beau que cher, niveau alimentation, et sans restaurant Crous à moins de 20 minutes. Je faisais partie de ces élèves qui se nourrissaient en priorité avec ce repas à 1€ du Crous. »
L’innovation par le financement participatif
Face à ce constat, l’École du Louvre a innové. Après avoir créé un fonds de dotation en 2020, l’établissement a lancé une campagne de financement participatif qui a dépassé toutes les espérances : 126 000 euros récoltés avec plus de 600 contributeurs.
Cette aide a transformé la vie d’Eya. D’abord une bourse d’urgence de 400 euros pour une facture EDF impayée, puis une bourse de recherche de 4 000 euros du Crédit Agricole. « Cette bourse fut un vrai soulagement, me permettant de ne pas reprendre un travail d’avril à septembre et de me consacrer enfin à 100 % à mes études. »
Des résultats qui parlent
L’impact de ces initiatives dépasse les témoignages individuels. La « Maison des Élèves », résidence de 50 places créée en partenariat avec des religieuses dominicaines pour accueillir les primo-arrivants, en est la preuve chiffrée. « Cette année, les résultats de première année montrent une réussite à 56 % en moyenne, mais ceux qui habitaient la maison ont réussi à 73 % », se félicite Claire Barbillon.
L’école propose trois types de bourses : vie, mobilité et recherche. « Parfois, il ne faut pas grand-chose », explique la directrice. « Un stage intensif d’une semaine, c’est exactement 300 à 400 euros. Il y a des élèves qui ne peuvent pas. Le fait qu’on puisse leur donner ce type de bourse, ça déclenche quelque chose. »
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Un cercle vertueux pour l’avenir
Cette expérience marque profondément les bénéficiaires. Eya, qui envisage de devenir conservatrice du patrimoine, en témoigne : « Je ne pensais pas qu’on atteindrait 126 000€ de cagnotte ! Je sais qu’à l’avenir, j’essaierai d’aider à mon échelle les étudiants qui seront mes futurs collègues. »
Pour Claire Barbillon, l’enjeu dépasse l’aide individuelle : « En créant une bourse pour aider un élève de l’École du Louvre, on lui permet de transformer l’égalité des chances en égalité dans la réussite. Cette réussite est évidemment productive pour le pays. » Car derrière ces futurs professionnels se cache un enjeu économique : « La France restera un pays extrêmement attractif du point de vue de son patrimoine. Pour que cette attractivité s’exerce, il faut des jeunes bien formés pour être les médiateurs de demain. »
Le message d’Eya aux donateurs résume l’esprit de cette initiative : « Aider les étudiants est un bel acte d’égalité des chances. Le talent et l’ambition ne devraient pas être contraints par des soucis financiers. Soutenir les étudiants précaires, c’est leur offrir des conditions dignes, ce qui ne devrait pas être un simple droit, mais une nécessité. »
La campagne reste ouverte jusqu’au 31 décembre, avec des contributions possibles à partir de 5 euros. Une preuve que l’art de donner peut, lui aussi, s’apprendre et se démocratiser.
NOTRE RÉSUMÉ EN
5 points clés
PAR L'EXPRESS CONNECT IA
(VÉRIFIÉ PAR NOTRE RÉDACTION)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : À l’École du Louvre, l’art de donner combat la précarité étudiante.
Une précarité étudiante bien réelle
Loin des clichés, 30 % des étudiants de l’École du Louvre sont boursiers et nombreux viennent de régions éloignées. Beaucoup font face à des conditions de vie difficiles, aggravées par l’absence de restaurants universitaires à proximité.
Un financement participatif innovant
L’École du Louvre a levé 126 000 euros grâce à une campagne de financement participatif, soutenue par plus de 600 donateurs. Ces fonds permettent d’attribuer des aides d’urgence, des bourses de recherche et des soutiens à la mobilité.
Un logement adapté, facteur de réussite
Les étudiants logés dans la « Maison des Élèves », une résidence étudiante créée en partenariat avec des religieuses, affichent un taux de réussite de 73 % en première année, contre 56 % pour la moyenne générale.
Un impact direct sur les parcours
Ces aides financières permettent aux étudiants de se concentrer sur leurs études sans cumuler d’emplois précaires. Elles ouvrent aussi des opportunités de stages ou de formations habituellement inaccessibles faute de moyens.
Un cercle vertueux pour l’avenir
La solidarité étudiante s’installe durablement : les bénéficiaires d’aujourd’hui, comme Eya, souhaitent eux-mêmes contribuer plus tard. L’École du Louvre montre qu’aider les étudiants précaires, c’est aussi investir dans l’avenir du patrimoine et de la culture française.













