Le cabinet de recrutement Robert Half a publié la cinquième édition de son baromètre « Ce que veulent les candidats ». Cette enquête s’intéresse notamment aux aspirations des jeunes travailleurs. Décryptage avec Laure Charbonneau, Directrice chez Robert Half.
Une grande majorité des jeunes français aime leur travail. C’est ce que révèle la cinquième édition du baromètre « Ce que veulent les candidats »* du cabinet de recrutement Robert Half, publié le 2 avril 2025. Selon l’étude, 75 % des 18-34 ans sont satisfaits de leur emploi actuel (19 % « très satisfaits » et 56 % « plutôt satisfaits »).
« C’est plus que les autres générations, souligne Laure Charbonneau, Directrice chez Robert Half. Cela casse un peu le mythe des jeunes au travail, et montre que l’on peut être épanoui lorsque que l’on démarre sa vie professionnelle », explique-t-elle.
Une génération favorable aux nouvelles opportunités
Pour autant, les jeunes travailleurs restent à l’écoute d’opportunités. « Ils sont davantage sollicités, ajoute Laure Charbonneau. Mais ce n’est pas parce qu’ils sont à l’écoute de nouvelles opportunités qu’ils sont désengagés au travail », tient-elle à souligner, évoquant « une génération en quête du mieux ». « Contrairement à certaines idées reçues, ils sont très investis dans leur travail. Mais s’il y a mieux autre part, ils sont prêts à y aller. C’est une grosse différence par rapport à leurs ainés ».
La plupart des jeunes interrogés, 60 % des 18-34 ans, sont prêts à changer de région ou de pays pour aller travailleur ailleurs. « C’est beaucoup plus que les autres générations (35-44 ans et 65 ans), qui se situent en dessous des 40 %, ajoute Laure Charbonneau. Le monde évolue, il est plus facile de bouger en France et à l’étranger. Il y a aussi beaucoup plus de communication entre les départements, les régions, les pays. C’est une génération qui n’a pas peur de se déplacer. Cela fait partie de leur environnement ».
Des attentes différentes
Les jeunes ont également de nouvelles attentes. « Ils sont beaucoup plus sensibles aux critères d’équilibre, parce que c’est une génération qui a cette alternative. Les générations précédentes, elles, ne pouvaient pas en parler parce que ce n’était pas envisageable. On devait se rendre sur son lieu de travail. C’était très rare d’avoir une option de flexibilité, avec le télétravail par exemple, ou des horaires un peu plus souples », détaille Laure Charbonneau.
Là encore, il ne s’agit pas de faire moins, mais de faire différemment, estime-t-elle. « C’est une génération qui veut se donner du temps. S’ils ont un loisir un soir dans la semaine, ils veulent pouvoir en profiter. Pour eux, cela fait partie intégrante de l’organisation du travail. C’est une génération de communication, de transparence. Ils vont aborder cette question sans arrière-pensée, sans tabou. Ils vont échanger sur l’organisation, la flexibilité, comme l’on peut parler du poste ou du salaire ».
Des jeunes en quête de sens dans leur emploi
Si le salaire se place toujours en tête des attentes des salariés (toutes générations confondues), les jeunes sont particulièrement sensibles à la quête de sens dans leur travail. « Quand on leur fixe un objectif, ils sont attentifs à ce que ça leur apporte personnellement, mais aussi à l’impact sur l’extérieur, comme l’environnement par exemple. Il faut que tout soit relié, et qu’ils y trouvent un intérêt. C’est aussi pour ça qu’ils ont cette mobilité, qu’ils sont plus ouverts à d’autres opportunités. Quand l’ennui s’installe, ou qu’ils ne trouvent plus de sens à ce qu’ils font, ils vont regarder ce qu’il se passe ailleurs ».
Un réflexe « plutôt sain », affirme Laure Charbonneau. « Toutes les entreprises préfèrent avoir des collaborateurs qui s’épanouissent, qui comprennent ce qu’ils font et pourquoi ils sont là ».
36 % des 18-34 ans se disent d’ailleurs prêts à quitter un CDI pour des missions d’intérim. « Un concept très nouveau », indique la Directrice. « Sans surprise, c’est le chiffre le plus haut par rapport aux autres générations qui sont autour de 20 % », précise-t-elle.
Pour les jeunes, la performance l’emporte sur l’ancienneté
Les jeunes communiquent plus facilement, mais sont-ils plus à l’aise lorsqu’il s’agit de négocier leur salaire ? 50 % l’affirment. « De fait, vous avez quand même un professionnel sur deux qui est dans le flou, souligne Laure Charbonneau. La première raison invoquée est la suivante : « Je ne sais pas combien je peux et je dois demander ». Il y a une incertitude du candidat sur sa valeur sur le marché. Et ça pour tous les professionnels, pas seulement les 18-34 ans ».
Il existe cependant « des solutions toutes simples » pour être plus confiant, assure la Directrice. « Il faut notamment se tenir informé des évolutions de grilles de salaires. Il y a encore beaucoup de pédagogie à faire là-dessus. Si l’on ne sait pas combien demander, on ne peut pas obtenir ce que l’on veut. La préparation est primordiale sur ce genre de négociation ».
Parmi les arguments en faveur d’une hausse de salaire, les 18-34 ans sont les seuls à placer les résultats sur objectifs fixés en première position. « Ils savent que la performance va primer sur d’autres critères pour obtenir une augmentation. Les deux autres générations analysées se basent, elles, sur l’ancienneté ». Un « mauvais réflexe », estime Laure Charbonneau. « Qu’est-ce qu’apporte cette ancienneté dans les résultats du collaborateur ? C’est là où je pense que les jeunes peuvent largement gagner la bataille, parce que les entreprises fonctionnent beaucoup aux objectifs fixés, elles ont elles-mêmes un objectif de croissance et de développement ».
L’intelligence artificielle, un atout supplémentaire selon la nouvelle génération
L’enquête de Robert Half se penche aussi sur l’arrivée de l’intelligence artificielle (IA). 56 % des 18-34 ans pensent que l’IA sera un atout dans leur travail. « Seulement 27 % des jeunes ont répondu qu’ils ne savent pas comment l’IA va impacter leur emploi. Ils ont beaucoup moins d’incertitudes que les autres générations ». De fait, les jeunes travailleurs « attendent de leur entreprise qu’elle les forme sur l’IA ».
« C’est un outil supplémentaire qui va leur permettre de gagner du temps, de se concentrer sur des tâches plus essentielles. Ils s’en servent déjà dans leur quotidien, en dehors de leur emploi. C’est aussi pour cela qu’ils l’appréhendent beaucoup plus facilement dans le contexte du travail », ajoute Laure Charbonneau.
En face, les entreprises doivent s’adapter à ces nouvelles expectatives. « Tout cela s’inscrit dans une évolution importante. Il faut pouvoir attirer les jeunes, faire en sorte qu’ils s’épanouissent et trouvent du sens dans ce qu’ils font pour qu’ils soient performants, se demander ce qui les intéresse et ce qui ne les intéresse plus », assure la Directrice, avant de conclure : « Ils ont envie de réussir et de construire. Nous avons tout intérêt à nous allier à eux ».
*Enquête menée en mars 2025 auprès d’un échantillon représentatif de 1 000 salariés français.
Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : Marché du travail et entreprise : ce que recherchent les jeunes diplômés.
Satisfaction au travail élevée : Selon l’enquête Robert Half, 75 % des jeunes de 18 à 34 ans sont satisfaits de leur emploi, inversant ainsi le stéréotype selon lequel les jeunes seraient désengagés au travail.
Ouverture aux opportunités : Bien que satisfaits, 60 % des jeunes diplômés sont prêts à déménager pour une meilleure opportunité, soulignant leur flexibilité et leur volonté de saisir de nouvelles chances professionnelles.
Attentes de flexibilité et d’équilibre : Les jeunes recherchent un équilibre entre vie professionnelle et personnelle, avec des demandes croissantes pour des options de télétravail et des horaires flexibles, montrant leur besoin d’une organisation du travail plus adaptée à leur style de vie.
Quête de sens et performance : Outre le salaire, les jeunes diplômés veulent comprendre l’impact de leur travail et sont prêts à changer d’emploi si cela manque de sens. Ils privilégient également la performance dans les négociations salariales, au lieu de se baser sur l’ancienneté.
Intelligence artificielle comme atout : Une majorité (56 %) des jeunes perçoivent l’intelligence artificielle comme un atout pour leur travail et expriment le besoin de formation sur son utilisation, montrant leur ouverture à intégrer de nouvelles technologies dans leur environnement professionnel.