Le Doctorate in Business Administration (DBA) se distingue du doctorat traditionnel par sa méthodologie innovante. Considéré comme « un générateur d’impact managérial et sociétal », il devrait rapidement attirer de nouveaux candidats.
C’est un programme qui gagne en popularité. Le DBA, Doctorate in Business Administration, est mis en place par de plus en plus d’écoles et d’universités françaises. Malgré son appellation, il est pourtant bien différent d’un doctorat traditionnel (PhD) ou d’un MBA (Master of Business Administration).
« Le DBA est un programme doctoral créé en 1953 par l’université Harvard. Il permet à des managers de s’engager dans la production d’une thèse », explique Michel Kalika, président du Business Science Institute et professeur émérite à iaelyon School of Management.
« Le doctorat traditionnel en management vise surtout à former des professeurs d’universités. Ce n’est pas l’objectif du DBA », souligne-t-il. Ici, ce sont plutôt les managers, top managers ou consultants, entre autres, qui sont concernés. « Le point de distinction entre le doctorat traditionnel et le DBA, c’est que dans nos thèses, il y a toujours un chapitre sur les recommandations managériales. C’est pour ça que l’on dit que le DBA est plus qu’un diplôme, c’est un générateur d’impact managérial et sociétal, ajoute Michel Kalika. Il permet à des managers de prendre du recul par rapport à une thématique qui les intéresse, et faire de la recherche utile pour les entreprises ».
« Dans notre programme, les doctorants n’écrivent pas pour des académiques, ni pour le scientifique, mais pour le décisionnaire, indique quant à lui Alon Rozen, doyen de l’École des Ponts Business School. Ce qui intéresse le décisionnaire, c’est ce qui est émergent dans une discipline. Par exemple, dans le milieu de la finance, il y a les fintechs ou les néo-banques ». « Dans les autres formations, vous apprenez la connaissance, précise Stéphane Thion, Executive DBA Program Manager à TBS Education. Mais dans un DBA, vous apprenez à contribuer à la création de la connaissance ».
Un programme sur plusieurs années un DBA en France
Sur quels sujets travaillent les doctorants ? « Il peut s’agir d’ateliers sur l’influence du développement durable sur les chaînes logistiques internationales par exemple, de l’influence des valeurs de l’islam sur l’industrie agroalimentaire, ou encore de l’évolution de la profession de notaire compte tenu des processus numériques », explique Michel Kalika. Le programme, organisé par le Business Science Institute et coordonné par le Service Formation Continue de iaelyon School of Management, plus précisément un Executive Doctorate of Business Administration (eDBA), se déroule sur 4 ans.
« La première année, il y a des séminaires de conduite de la recherche, de méthodologie. Nous sommes dans une logique d’accompagnement, avec deux objectifs principaux : aider le doctorant manager à définir son sujet, et identifier un directeur de thèse. La caractéristique du DBA, c’est que le manager travaille de façon très étroite avec un professeur », détaille Michel Kalika. En deuxième année, « le doctorant a des séminaires de suivi, mais aussi un suivi très régulier avec son directeur de thèse. C’est comme ça jusqu’à la soutenance » complète-t-il, soulignant une particularité de son programme : encourager tous les docteurs à écrire un livre après la soutenance de leur thèse. « Nous avons publié plus de 55 livres directement encrés sur des sujets de société ou d’entreprise », se félicite-t-il.
Le eDBA de l’École des Ponts a une approche légèrement différente. « Nous allons trouver un superviseur lié à leur discipline et à leur métier, qui n’est pas un de nos professeurs. Il s’agit d’un expert du domaine en question », indique Alon Rozen. Ici, le programme « est structuré pour être faisable en deux ans et demi, trois ans, selon les capacités de travail de la personne. Il y a une partie avec des cours, puis ils travaillent sur leur projet doctoral, leurs trois articles ».
Le eDBA de TBS se déroule lui sur 4 ans. « Ils apprennent des méthodes applicables à tous les domaines, la finance, le marketing… Cela permet d’avoir un impact social et économique important. En réalisant leur thèse, ils font de l’apprentissage par l’action, ils s’imprègnent de la méthode, détaille Stéphane Thion ». Sans oublier le bénéfice pour l’école. « Certains vont notamment continuer à publier dans la recherche, produire de la connaissance, ce qui valorise les établissements ».
Le profil des candidats
Qui peut y prétendre ? « Les candidats doivent avoir au minimum 5 ans d’expérience professionnelle. Mais ils en ont généralement beaucoup plus. Dans notre programme, la moyenne d’âge est de 45, 46 ans. Nous nous adressons à des personnes qui ont déjà un MBA, un master ou un diplôme d’ingénieur. Nous avons des fonctionnaires d’État, des managers de grandes entreprises, des dirigeants, beaucoup de consultants. Ils viennent d’Europe, d’Asie, d’Afrique, des USA…Une soixantaine de pays sont représentés par nos doctorants. Avec moins de femmes, que nous encourageons à se lancer », précise Michel Kalika.
Une vingtaine de pays sont également représentés à l’École des Ponts, où les doctorants créent « des amitiés incroyables », loin d’une « démarche solitaire constatée dans la plupart des doctorats ». Les candidats doivent cette fois avoir au minimum 10 ans d’expérience professionnelle. Là encore, c’est souvent plus. Le pourcentage de femmes, de 40 % l’année dernière, est tombé à 25 %, regrette Alon Rozen. TBS compte de son côté 10 à 15 % d’enseignants vacataires, environ un tiers de consultants, et des managers ou top managers d’entreprises, d’ONG, et même du monde politique. Un public âgé de 42 ans en moyenne. Là encore, un bac+5 est exigé, et à minima 5 ans d’expérience.
Des motivations professionnelles et personnelles
Michel Kalika évoque « deux grands types de motivation ». Tout d’abord, les motivations professionnelles. « Pour ceux qui travaillent dans des grandes organisations internationales, c’est un moyen de reconnaissance, de monter dans la hiérarchie. C’est aussi une façon de se démarquer. Aujourd’hui, tous les managers ont un MBA, un master. C’est une des raisons pour lesquelles le marché du DBA va se développer ». Quant aux motivations personnelles, le professeur note « une quête de sens ». « Nous sommes face à des managers qui ont réussi, qui ont gravi les échelons dans les entreprises. Ils ont envie de remettre en cause ce qu’ils ont fait. Ils prennent aussi goût à la transmission des connaissances ».
« Il y a cette possibilité de renouveler les compétences, estime Alon Rozen. Aujourd’hui, les quadragénaires et quinquagénaires vont travailler plus longtemps, ajoute-t-il. Ils doivent aussi se préparer à une autre carrière. Le programme permet d’obtenir une expertise dans les domaines émergents. Sans oublier le personal branding, la marque employée, avec une expertise facilement reconnaissable grâce à leurs publications ».
« La pensée analytique est une compétence de plus en plus demandée »
« La production de connaissance croît de façon exponentielle, de même pour la technologie, ou la force des réseaux sociaux, explique Stéphane Thion. De fait, la prise de décisions est complexe, puisque la connaissance qui permet de prendre des décisions rationnelles est difficile à trouver. Dans ce contexte, il est plus intéressant d’apprendre les méthodes pour apprendre à maîtriser ces connaissances, plutôt que d’apprendre une connaissance périssable ».
Le DBA a donc de beaux jours devant lui. « La pensée analytique est une compétence de plus en plus demandée. C’est le programme le plus adapté pour y répondre », assure-t-il. « Le DBA va se développer pour plusieurs raisons, confirme Michel Kalika. Tout d’abord, pour se démarquer des autres. La deuxième raison, c’est la remise en cause des connaissances et des modèles actuels. Nous vivons des changements brutaux, auxquels il faut apporter des réponses nouvelles ». Les tarifs, eux, peuvent varier de plusieurs milliers d’euros selon les formations.
Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : le Doctorate of Business Administration (DBA) et son attrait pour les professionnels.
Qu’est-ce que le DBA ? Le Doctorate of Business Administration (DBA) est un diplôme professionnel de l’enseignement supérieur qui permet aux managers et consultants de s’engager dans une recherche appliquée tout en développant des compétences managériales avancées, se distinguant ainsi des doctorats traditionnels effectués par les étudiants.
Attirance pour les professionnels expérimentés : Le DBA s’adresse aux professionnels ayant au moins cinq ans d’expérience, principalement des étudiants diplômés de niveau Bac +5, qui cherchent à enrichir leur expertise par des ateliers dans des domaines émergents tout en poursuivant des objectifs de carrière spécifiques, hors du monde académique.
Bénéfices de l’accompagnement et de la formation : Les programmes de DBA incluent un encadrement personnalisé avec des experts du secteur, des ateliers, un travail de recherche, des managers expérimentés et favorisent l’apprentissage basé sur des projets, offrant ainsi une expérience concrète et utile pour les participants.
Motivation et quête de sens : Les candidats ou étudiants sont souvent animés par une double motivation : professionnelle, visant une reconnaissance et une avancée dans leur hiérarchie, et personnelle, cherchant un sens et une remise en question de leur parcours professionnel.
Demande croissante de compétences analytiques : Le DBA répond à un besoin croissant de pensée analytique, une compétence essentielle dans un monde en rapide évolution où les professionnels doivent naviguer entre complexité et innovation. Les résultats, tels que les publications et les expertises, valorisent par exemple les diplômés sur le marché du travail.