Une carrière musicale peut débuter dans une chambre, s’exposer sur TikTok et exploser sur scène. Mais entre buzz et long terme, que faut-il vraiment pour tenir ? Levon Khozian, vainqueur de The Voice 2025, et Édouard Rondeau, ex-Sony et Warner, aujourd’hui Marketing Manager chez le label indépendant Tie Break Music, décryptent les vraies règles du jeu.
Avant de remplir les salles de concert ou d’être streamé des millions de fois, il faut surtout oser. C’est le premier conseil d’Édouard Rondeau : « Il ne faut pas attendre de trouver un label, un tourneur, un éditeur. Aujourd’hui, un artiste peut commencer seul, dans sa chambre, avec un ordinateur. Il peut livrer un titre sur les plateformes, cibler des blogs. » Le mot d’ordre : initier le mouvement, même sans entourage.
Levon Khozian illustre ce chemin progressif, fait de persévérance. Enfant, il danse dans une association arménienne à Marseille. Très vite, il découvre le duduk, flûte traditionnelle dont le timbre devient sa signature acoustique. Musicien avant tout, il se forge sur scène, enchaîne galas, soirées privées, événements. « J’ai beaucoup appris en accompagnant d’autres artistes. » Il chante en arménien, en anglais, en français. Passe par le Dalida Institute à Aix-en-Provence, une école de formation professionnelle et tente The Voice à trois reprises, avant de réussir le casting en 2023. « Il faut être prêt. Mentalement, techniquement. Ce n’est pas un coup de chance, c’est un parcours. »
« Il faut travailler, créer, ne rien lâcher »
Levon insiste sur la rigueur et l’endurance mentale : « Il faut être costaud. Ne jamais s’excuser d’être là. Chacun a un message à apporter. Il faut travailler, créer, croire en ce qu’on fait. » Même après The Voice, rien n’est joué : « The Voice, c’est une vitrine folle, une exposition massive. Mais ça reste une étape. Après, tout est à construire. »
Cette discipline, Édouard Rondeau la voit comme un indicateur clé : « Tous les artistes diront qu’ils ont envie de réussir. Mais on sent très vite ceux qui ont une vraie “faim”, une volonté de tout donner. »
Quelles sont les stratégies pour être repéré aujourd’hui ?
Longtemps, les maisons de disques allaient « dénicher » les artistes. Aujourd’hui, l’ordre est bousculé. « Les jeunes talents arrivent par le réseau, via des managers ou des éditeurs qui présentent leurs projets aux labels », explique Édouard Rondeau. Les plateformes comme SoundCloud, TikTok ou YouTube jouent aussi un rôle, mais pas toujours celui qu’on croit. « On va regarder ce qui circule, mais on se méfie des statistiques brutes. Ce qui compte, c’est l’univers artistique, la cohérence, et surtout la capacité à se projeter avec l’artiste. On a vu des artistes avec 200 000 abonnés Instagram mais sans public fidèle. À l’inverse, d’autres qui n’ont pas de “stats”, mais une vraie vision. »
Inutile donc d’acheter des vues ou de fantasmer sur une viralité artificielle : mieux vaut soigner ses premières scènes, ses maquettes, son esthétique, et s’entourer intelligemment. Les festivals repèrent, les éditeurs suggèrent, les managers présentent, et ce maillage finit par attirer l’attention des labels. « C’est un mix entre réseau professionnel, scène émergente, et présence numérique », résume Édouard.
Concours TV : un retour en grâce inattendu
Longtemps relégués au second plan, les concours musicaux télévisés comme The Voice ou Star Academy connaissent un retour spectaculaire. Un phénomène que nos deux interlocuteurs observent de près : « Pendant dix ans, le rap a saturé le marché, représentant jusqu’à 80 % de la consommation musicale en France. Mais depuis deux ans, on assiste à une résurgence de la variété française, portée justement par ces émissions », constate Édouard Rondeau.
Levon Khozian, finaliste et vainqueur de The Voice avec le trio Il Cello, en mesure déjà les effets : un album en préparation, une tournée avec Florent Pagny… « C’est une vitrine immense. Mais il faut savoir en sortir avec un projet solide. » Édouard abonde : « On n’y croyait plus vraiment, et pourtant, plusieurs artistes révélés ces deux dernières années cartonnent : Pierre Garnier, Héléna, Marine, Marguerite… Mais attention : l’exposition médiatique ne suffit pas. Sans structure, sans stratégie, elle se dilue. »
C’est là que la maison de disques joue tout son rôle : transformer un coup de projecteur en véritable carrière. En coordonnant l’ensemble des leviers – production, distribution, communication, réseaux sociaux, médias, scène – elle permet d’éviter l’éparpillement et d’ancrer le projet dans la durée. « On ne fait pas juste un single, on construit une trajectoire », résume Édouard Rondeau.
Face à la tentation de l’auto-production totale, les labels retrouvent une légitimité : celle d’un cadre structurant, d’un accompagnement sur-mesure, d’une vision à long terme. Un rôle d’autant plus précieux que le marché reste féroce et saturé. « Aujourd’hui, 100 000 titres sortent chaque jour sur les plateformes. La musique seule ne suffit plus. Il faut savoir la défendre, l’incarner, la porter dans le temps. » Un défi immense, mais pas inaccessible, pour peu qu’on sache s’entourer, et avancer avec méthode.
Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : “The Voice, TikTok et au-delà : les règles du jeu pour percer dans la musique” :
La persévérance et l’audace comme clés du succès : Les artistes doivent oser se lancer seuls, créer dans leur chambre, et multiplier les expériences pour se faire connaître. La réussite ne repose pas seulement sur un coup de chance, mais sur un parcours de travail rigoureux, de création constante et de résilience mentale.
L’importance du réseau et de la stratégie : Se faire repérer aujourd’hui ne dépend pas uniquement des statistiques sur TikTok ou YouTube. La cohérence artistique, une vision claire et le développement d’un réseau professionnel (manageurs, festivals, médias) sont essentiels pour attirer l’attention des labels.
Le rôle crucial des concours télévisés : Des émissions comme The Voice ou Star Academy, longtemps délaissées, connaissent un renouveau. Elles offrent une vitrine majeure et peuvent lancer de véritables carrières, à condition d’accompagner cette visibilité d’un projet solide et d’un encadrement professionnel.
La maison de disques, un partenaire incontournable : Au-delà de l’exposition médiatique, le label joue un rôle stratégique en structurant la carrière avec une approche à long terme, intégrant production, communication et scène, pour transformer un simple succès viral en une trajectoire durable.
La nécessité d’un accompagnement professionnel face à un marché saturé : Réussir aujourd’hui nécessite plus qu’un single viral : il faut savoir défendre et faire vivre sa musique sur le long terme, en s’entourant d’experts et en adoptant une stratégie cohérente pour se démarquer dans un marché où 100 000 titres sortent quotidiennement.













