L’IFIC, école de communication et de journalisme à Vichy (Allier), fait face à plusieurs défis. Parmi eux, celui de réapprendre aux jeunes à être curieux, ou encore d’outrepasser la crainte de l’autre, engendrée par l’omniprésence des écrans. Décryptage avec Marc-Alexis Roquejoffre, fondateur et président de l’établissement.
Les jeunes ne prennent-ils plus suffisamment le temps ? Dans une société où tout accélère, l’un des enjeux des études de communication est « de transformer leur rapport au court en une nécessité de long », estime Marc-Alexis Roquejoffre, fondateur de l’IFIC (Institut de Formations à l’Information et à la Communication).
Deux formations diplômantes en communication sont notamment dispensées dans cette jeune école de 4 ans, basée à Vichy, dans l’Allier. Un Bachelor (3e année) Responsable Projet Communication et un Mastère Directeur de Projets Image Communication. Au fil des années, le journaliste a remarqué une impatience généralisée chez ses étudiants. « Ils veulent toujours tout faire rapidement. On nous a fait croire, via les réseaux sociaux, le système de scroll, qu’en une seconde, le cerveau doit être convaincu. Ce n’est pas le cas », affirme-t-il.
« Il faut que l’on impose, nous, les professionnels de la communication et du journalisme, un retour à un minimum de longueur. Dans les textes, l’image, ou encore le podcast, un format avec lequel cela fonctionne très bien. Aujourd’hui, on écoute des podcasts de 50 minutes, et on ne s’ennuie pas ».
Apprendre à être curieux
Marc-Alexis Roquejoffre évoque également « un manque de rapport à la curiosité » chez la nouvelle génération. « Les jeunes savent faire des choses, c’est indéniable. Mais quand on creuse dans le fond, ça ne suffit pas, explique-t-il. Je suis convaincu que l’on peut apprendre à être curieux, apprendre à regarder la différence chez l’autre. Je pense que c’est en se rendant curieux vis-à-vis de l’autre que l’on développe une curiosité vis-à-vis de soi-même », développe le président de l’IFIC.
Comment expliquer cette lacune ? « Il y a peut-être un élément complémentaire indirectement lié, c’est la peur de l’autre, souligne-t-il. Le rapport aux écrans les conduit à la crainte d’autrui. Ils ne savent plus téléphoner. Pour eux, la communication, c’est prendre le téléphone et envoyer un message sur WhatsApp. Certains ne savent même pas ce qu’est un SMS. Ce n’est pas qu’ils ne sont pas capables de le faire, c’est qu’ils n’ont pas les codes, que nous leur apprenons, tout comme les soft skills (capacités à se comporter, ou savoir-être, ndlr) ».
La prise de parole en public
La prise de parole en public, exercice peu apprécié des étudiants mais inhérent aux métiers de la communication, est elle aussi enseignée à l’IFIC. « Ils sont obligés de travailler l’oral, notamment dans le cadre de leur examen. Malgré leur réticence, on a 100 % de réussite sur l’oral. Mais il faut les pousser », souligne Marc-Alexis Roquejoffre.
Au cours de sa vie professionnelle, un communiquant doit pouvoir réaliser des présentations, y compris devant plusieurs interlocuteurs. « Nous avons un professeur qui leur apprend à pitcher, à vendre un projet auprès d’un dirigeant. Nous faisons venir des chefs d’entreprise, devant lesquels les étudiants passent les uns après les autres. Avant d’être présenté sous forme de PowerPoint, il y a un pitch pour convaincre. C’est important qu’ils en aient conscience et qu’ils soient en mesure de le faire ».
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L’introduction de l’intelligence artificielle
Les enseignements font face à un autre défi de taille : l’introduction de l’intelligence artificielle (IA). « L’IA doit être vécue comme un outil au service de l’humain », selon le journaliste, qui a décidé de l’inclure dans les formations de son établissement. « Dans le cadre du Bachelor, on leur apprend à travailler les prompts (instruction donnée à une IA générative, ndlr), et à utiliser l’IA sans en avoir peur. Pour le Mastère, nous allons beaucoup plus loin, avec la découverte de logiciels qui vont nous permettre de nous rendre des services en tant que professionnels de la parole ».
L’IA nous pousserait par ailleurs à être « plus intelligents », assure le président de l’IFIC. « De fait, on ne se fait plus forcément avoir par la communication publicitaire. Moralité : celui qui veut communiquer va être obligé d’être dans la transparence du dire, du vrai, de la responsabilité, de la durabilité et de l’authenticité ».
Une authenticité que Marc-Alexis Roquejoffre souhaite préserver au sein de son école, à taille humaine. « Cela nous permet de proposer un accompagnement personnalisé, un dialogue entre les enseignants et les jeunes, mais aussi avec la direction. Nous souhaitons pouvoir appeler tous nos étudiants par leur prénom. Une des particularités de l’IFIC, où les jeunes effectuent trois semaines en entreprise, et une en formation, c’est que toutes les formations auront lieu en même temps, la même semaine, dès la rentrée prochaine. Le but étant à tous les élèves, toutes formations confondues (communication et journalisme) de se rencontrer et d’échanger ».
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NOTRE RÉSUMÉ EN
5 points clés
PAR L'EXPRESS CONNECT IA
(VÉRIFIÉ PAR NOTRE RÉDACTION)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : Comment former la nouvelle génération aux métiers de la communication à l’ère de l’instantanéité, du manque de curiosité et de l’intelligence artificielle.
Réapprendre à prendre le temps
Dans une société dominée par l’instantanéité des réseaux sociaux, l’IFIC mise sur des formats longs (podcasts, textes approfondis…) pour réhabituer les étudiants à la durée et à la profondeur, essentielles à tout communicant.
Cultiver la curiosité et l’ouverture à l’autre
Le manque de curiosité chez les jeunes est un frein majeur. L’école cherche à raviver l’envie de comprendre le monde et les autres, en luttant contre la peur de l’interaction directe, renforcée par l’usage intensif des écrans.
Travailler les soft skills et l’oralité
Prise de parole, pitch, aisance relationnelle : autant de compétences humaines clés intégrées au cœur du programme. Les étudiants apprennent à s’exprimer en public et à convaincre des professionnels réels lors de présentations.
Intégrer l’intelligence artificielle de façon constructive
L’IFIC enseigne l’IA comme un levier, pas un substitut. Les étudiants apprennent à formuler des prompts, à maîtriser les outils IA et à garder un regard critique et éthique sur leur usage.
Promouvoir une pédagogie humaine et individualisée
Taille réduite des promotions, dialogue constant avec les enseignants, emploi du temps synchronisé entre filières : l’école valorise un accompagnement de proximité pour créer une vraie communauté d’apprentissage.















