Un MBA est-il vraiment un accélérateur de carrière ?

Les avantages du MBA

Sur le papier, la poursuite d’un MBA est un choix intéressant pour des cadres et des dirigeants. Il promet, en effet, de belles carrières et des salaires importants une fois le diplôme en poche. 


Mais qu’en est-il de la réalité sur le terrain et sur le marché de l’emploi. Quel retour sur investissement attendre d’un MBA ou de son pendant l’exécutive MBA ? Les réponses de spécialistes. 

116 ans en 2024 pour les MBA ! Un anniversaire en demi-teinte. En effet, selon la fameux classement du Financial Times publié en février 2024, les candidatures aux MBA à travers le monde ont diminué de 5 % en 2023. Soit une baisse pour la deuxième année consécutive. C’est notamment le cas pour les MBA historiques d’une durée de 2 ans.

A ce fléchissement, plusieurs explications. D’abord, le coût de ces formations, s’élevant parfois jusqu’à 100 000 euros, pour les plus prestigieuses, que les candidats peinent à financer. Ensuite, l’investissement en terme de temps. En temps complet, un MBA peut sortir un cadre de son emploi pendant 2 ans. Une période qui peut s’avérer longue à l’échelle d’une carrière.

Enfin, la conjoncture économique peut aussi peser dans la balance. Dans les écoles, on insiste sur le côté contracyclique des MBA. Le marché des MBA croit quand la conjoncture économique se dégrade. Quand tout va pour le mieux et que le marché de l’emploi est favorable aux candidats, nul besoin de se lancer dans un MBA pour décrocher des postes à responsabilités et les rémunérations élevées qui vont avec.

Si l’on en croit le discours des écoles, faire un MBA est toujours un accélérateur de carrière. Un moyen de faire un bond salarial conséquent. « Notre MBA et notre Executive MBA attirent des profils différents avec des objectifs différents. Alors que l’objectif principal de l’Executive MBA est la transformation de carrière, l’intelligence émotionnelle et le réseautage, nos diplômés bénéficient d’une augmentation de salaire moyenne de 30 % pendant le programme ou juste après. Notre MBA classique attire les profils ayant entre 2 et 10 ans d’expérience, généralement ces étudiants recherchent une transformation de carrière plus radicale – avec un changement de secteur, de fonction et/ou de pays. En moyenne, ils doublent leur salaire, dans leurs nouvelles fonctions après l’obtention de leur diplôme », souligne Sara Vanos, directrice exécutive des admissions pour les programmes MBA de HEC Paris.

Au-delà, l’aspect salarial, un MBA ou un EMBA est un excellent moyen de booster son réseau. Dans les promos, des étudiants venus de secteurs d’activités et du monde entier, donc des opportunités pour créer des liens et avoir la primauté sur certains postes de haut niveau. Ces formations d’élite sont aussi des boosters de confiance en soi. Toujours utile pour « se vendre » auprès des recruteurs.

Justement que pensent les recruteurs et les experts spécialisés dans les carrières de dirigeants de ces MBA et autres EMBA ? En prise avec la réalité du terrain, ils sont moins dithyrambiques sur la valeur ajoutée de ces formations. « Aujourd’hui, le diplôme a tendance à s’effacer au profit de l’expérience professionnelle. Les marchés sont volatiles donc les employeurs accordent un intérêt grandissant aux profils proactifs pour parer à un monde incertain. Ils ont besoin de professionnels agiles et pas nécessairement de candidats bardés de grands diplômes. Les bénéfices attendus en termes de rémunération MBA sont surévalués par les écoles. Dans les entreprises qui gèrent les carrières de manière délibérée, autrement dit qui proposent à leurs talents d’alterner postes opérationnels et fonctionnels, missions en France et à l’étranger, etc, un MBA ne sert pas à grand-chose en réalité », soutient Hervé Borensztejn, manager partner en charge du conseil au sein du cabinet de chasse de tête Heidrick & Struggles.

Aurélie Foucart, coach executive carrière et leadership, constate également que « les MBA sont aujourd’hui moins valorisés par les employeurs que dans les années 2000. Pour faire un gap salarial, ce n’est pas toujours la bonne stratégie car cela suppose de quitter son poste pendant 12 à 24 mois. Des formations plus courtes et plus spécifiques, par exemple en intelligence artificielle, sont parfois plus payantes ». 

Pour autant, ce n’est évidemment pas la fin des MBA et des EMBA. Pour certains profils c’est encore la voie royale pour progresser dans une carrière. « Dans les entreprises sans gestion de carrière effective ou pour des candidats à la reconversion, les MBA permettent toujours l’acquisition de compétences solides valorisables sur le marché », observe Hervé Borensztejn (Heidrick & Struggles). Notamment pour les participants qui souhaitent se lancer dans la création d’entreprise.

Quand une entreprise co-finance, voire finance entièrement, un EMBA à des cadres, elle expose un potentiel et a déjà un poste en vue pour lui. « Le MBA ou l’EMBA est proposé en vue du poste suivant pour combler des lacunes spécifiques, développer un réseau, une expertise ou encore un tropisme sur une région. L’employeur regarde l’EMBA au prisme du poste d’après et pas du poste d’avant », ajoute-t-il. Les ingénieurs sont également des publics adaptés pour les MBA. « En se lançant dans un MBA ou un EMBA, un ingénieur de Centrale va acquérir un « vernis » business qui lui permettra d’embrasser ensuite un parcours de dirigeant », illustre Aurélie Foucart. Et puis bien sûr, les candidats qui visent une carrière internationale, notamment aux Etats-Unis, ont bien compris l’enjeu de suivre et de valider un MBA. Outre-Atlantique, c’est un peu « si tu n’as pas fait un MBA à 40 ans, tu as raté ta vie ». Mais dans ce cas, autant faire son MBA à l’étranger.